Coronavirus Covid-19 et suivi de Grossesse par le docteur Marpeau

Le docteur Olivier Marpeau répond à nos questions concernant le suivi de grossesse en période de Coronavirus Covid-19 et nous apporte des réponses concrètes de spécialiste.

Interview Docteur Marpeau gynécologue obstétricien spécialisé en chirurgie gynécologique.

Qu’est-ce qui diffère concrètement en matière de suivi de grossesse en cette période de Covid-19  ?

En cette période de circulation du virus, notre objectif est d’exposer le moins possible la femme enceinte, considérée comme très à risque.

En matière de suivi de grossesse il est difficile de supprimer les rendez-vous puisqu’ils sont tous potentiellement utiles. Ils permettent de réaliser une échographie de datation en début de grossesse, de vérifier le col de l’utérus en cas de contractions, de contrôler la tension artérielle, de vérifier la bonne vitalité fœtale. Il est cependant envisageable de les espacer. Cela revient à passer par exemple à une visite toutes les 4 à 6 semaines au lieu de 3 à 4 semaines pour une grossesse gémellaire.

De la même manière nous préconisons aux futures mamans d’espacer les examens biologiques. Le test de sérologie toxoplasmose par exemple peut être pratiqué tous les 2 ou 3 mois au lieu de tous les mois.

La téléconsultation est un outil très intéressant dans cette situation. Elle est particulièrement utile dans la préparation à l’accouchement réalisée par les sages-femmes. Elle trouve également toute sa place dans le suivi des patientes éloignées de leur praticien ou de la structure dans laquelle elles doivent accoucher.

Le fait de pouvoir recevoir les femmes enceintes en cabinet de ville plutôt que dans une structure de soins présente aussi l’avantage de moins les exposer.

Enfin, nous essayons encore plus qu’en temps normal de favoriser la prise en charge à domicile en cas de menace d’accouchement prématuré. Une sage femme peut organiser un suivi à distance, la future maman lui transmettant quotidiennement la mesure de ses constantes et les enregistrements de ses contractions eu du rythme cardiaque fœtal.

Risque du coronavirus encouru par la mère

Les futures mamans entrent dans la catégorie de la population à risque de développer des complications sévères d’une infection par le COVID-19.

Les fonctionnements hémodynamique (cœur, circulation sanguine) et respiratoire d’une femme enceinte sont très différents d’une femme qui ne l’est pas, surtout au troisième trimestre de grossesse. En effet, le volume occupé dans l’abdomen par le fœtus, le liquide amniotique, le placenta et l’utérus constitue un obstacle au fonctionnement normal respiratoire. La capacité respiratoire d’une femme enceinte au troisième trimestre est nettement diminuée. Ce phénomène est encore plus marqué en cas de grossesse gémellaire. En cas d’ infection respiratoire par le COVID-19, le risque de développer une forme plus grave de la maladie est donc accru.

Risque lié au coronavirus encouru par le fœtus

Comme pour toute infection, la fièvre, la toux et l’altération de l’état général sont des facteurs de risque de contractions et par conséquence de prématurité.

Le danger que représente le Covid-19 dans le cas d’une future maman infectée est celui d’une naissance prématurée d’un enfant fragile, de petit poids, et immature sur le plan neurologique et respiratoire, dans un contexte d’infection maternelle.

Il n’y a en revanche pas de preuve d’atteinte directe du fœtus par le COVID-19 lors de sa vie intra-utérine. Contrairement à une infection par le CMV ou la toxoplasmose, responsables d’atteintes spécifiques du système nerveux central , de l’œil ou de l’oreille, le COVID-19 ne semble pas franchir la barrière placentaire ni causer d’atteinte directe du fœtus.

Une question se pose sur l’usage des corticoïdes administrés aux patientes présentant une menace d’accouchement prématuré afin de prévenir les complications respiratoires, neurologiques et digestives liées à la prématurité. La balance bénéfices/risques pèse en faveur du traitement dans les formes sévères de menace d’accouchement prématuré en dehors de tout contexte infectieux.

Mesures mises en place au moment de l’accouchement

Les mesures mises en place dans les maternités françaises varient d’un établissement à l’autre.

Le Collège National des Gynécologues Obstétriciens Français autorise la présence d’un accompagnant à l’accouchement si il s’agit d’un accouchement normal. L’accompagnant doit ensuite quitter la maternité jusqu’à la sortie de la patiente et de son bébé.

Certaines maternités autorisent la présence de l’accompagnant à l’accouchement et lors du séjour de sa compagne, à condition qu’il ne sorte pas de l’établissement jusqu’à la fin du séjour. A la Maternité de l’Étoile à Aix en Provence par exemple le père peut rester à l’accouchement et les deux heures qui suivent puis s’en aller avant de revenir chercher d’elle et enfant le jour de la sortie (2-3 jours après l’accouchement ). D’autres structures sont beaucoup plus strictes et ne tolèrent aucun présence extérieure, ni à l’accouchement, ni pendant le séjour.

On observe d’ailleurs un certain nomadisme des patientes à la recherche de la maternité la plus tolérante vis à vis de la personne accompagnant la femme enceinte.

Quels changements pourraient engendrer cette crise sanitaire sur le long terme en matière de suivi de grossesse  ?

J’espère que cette crise rendra la population plus attentive aux risques viraux encourus au cours de la grossesse et notamment pendant la période hivernale. Cela pourrait permettre d’encourager les futures mamans à se laver les mains avec des solutions hydro-alcooliques, à porter un masque et à se faire vacciner contre la grippe. Je souhaite également une prise de conscience de l’entourage pour protéger au quotidien la femme enceinte.

Il y a d’ailleurs fort à parier que les mesures barrières mises en place durant cette épidémie ont permis de diminuer de manière importante la fréquence des autres épidémies comme la grippe et les gastro-entérites.

Cela aura sans doute aussi un impact sur la téléconsultation. S’il elle est compliquée à mettre tout le long du suivi de grossesse, elle est tout à fait envisageable dans le cadre de la prescription d’examens comme le dépistage du diabète et dans la consultation de leurs résultats.

Lors d’une téléconsultation, la patiente peut également discuter avec son gynécologue ou sa sage-femme et être informée des modalités de suivi de grossesse, des grandes étapes à venir et des modalités d’accouchement (accouchement voie basse, césarienne).

De manière plus large que le cadre de la grossesse, la téléconsultation est intéressante pour répondre aux questions des patientes avant une intervention chirurgicale. Les consultations de contrôle post-opératoires après une intervention simple peuvent également être gérées en téléconsultation. Le renouvellement d’une contraception orale et l’évaluation de sa tolérance sont parfaitement adaptés à la téléconsultation.

La téléconsultation est une alternative intéressante pour diminuer les contraintes liées à la distance, épidémie ou non.

Vos patientes vous semblent plus inquiètes en cette période particulière  ?

On ressent une angoisse plus forte chez les futures mamans, particulièrement chez celles proches du terme et qui voient approcher l’accouchement. Elles s’inquiètent beaucoup de l’isolement auquel les contraint cette épidémie, notamment lorsqu’elles seront à la maternité.

Elles ont également peur pour leur bébé et sur les risque encourus après la naissance.

Il est important de les accompagner, de les rassurer sur leur suivi et leur prise en charge et sur le fait qu’elles pourront allaiter si elles le souhaitent même si elles sont infectées par le COVID-19.

Un grand merci au Docteur Marpeau pour son témoignage complet et utile.

Photographie : Kathryn de Sages Comme des Images

No Comments Yet

Leave a Reply

Your email address will not be published.

Tourisme en famille
Ils parlent de nous Ils parlent de nous

Nos articles sont rédigés en collaboration avec des marques ou des partenaires. Il s’agit de contenu sponsorisé #publicité. Nous restons parfaitement objectif sur notre choix rédactionnel, parfaitement critiques sur les produits ou destinations testées  mais cela nous permet de continuer à faire vivre ce magazine et à vous apporter gratuitement du contenu de qualité.

Avis parents de jumeauxAvis parents de jumeaux